« La CGT est pour le maintien de tous les sites »

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Bruno Lemerle, secrétaire de la CGT à l'usine Peugeot Sochaux depuis dix ans vient de passer la main à Marc Spirkel. Il reste délégué au CCE et au Comité de groupe européen. Il a accordé une interview à Factuel.info avant la remise des conclusions du rapport SECAFI.

Dans la situation de difficultés actuelles, que préconise votre organisation ?

La politique préconisée par la CGT est, face au constat de la chute des ventes en Europe, d’améliorer les conditions de travail et de mettre en place des journées de chômage partiel avec un dispositif d’indemnisation correct comme l’Activité Partielle de Longue Durée (soit une indemnité horaire au moins égale à 75 % de la rémunération horaire brute, NDLR). La situation des intérimaires aussi est à prendre en compte. La CGT considère que la baisse de l’activité est transitoire, qu’un nouveau modèle de véhicule est à venir et qu’il faudra, dans un premier temps, fournir tous les concessionnaires (procédure habituelle), donc produire. La suppression de postes ou le renvoi des intérims ne sont pas souhaitables. 

Que pensez-vous du rapport Sartorius remis au ministre Montebourg il y a quinze jours ?
Le rapport Sartorius vaut surtout sur un point : l’affirmation que les nombreuses distributions aux actionnaires et les rachats d’actions par PSA manquent aux investissements qu’il aurait fallu faire. C’est 6 milliards en tout : la famille Peugeot a choisi de mettre cet argent ailleurs. Le développement international a été négligé, ce qui ne veut pas dire qu’il aurait fallu délocaliser pour autant.

Comment évaluez-vous le plan de restructuration de la direction ?

Le plan de restructuration provoquera une cascade d’effets négatifs (charges de travail et compétences incertaines sur les modèles de voitures) d’Aulnay vers Poissy, vers Mulhouse, vers Sochaux. Une charge importante de travail est attendue sur une des deux chaînes à Sochaux. Une répartition plus égale et rationnelle serait à faire. L’escalade de la recherche du low coast pour les coûts de production (salaires surtout) est dangereuse : quid du pouvoir d’achat diminué partout, qui achètera les véhicules entrée et milieu de gamme ? La « Recherche et Développement » est menacée par le plan. Les services « qualité » et « logistique » également. De même, en production, les ouvriers « en inadéquation d’emploi » c’est-à-dire les plus âgés que l’on encourage à partir avec des mesures douteuses : mensonge sur un projet professionnel énoncé à Pôle emploi pour une indemnisation jusqu’à la retraite. Les conditions matérielles de départ, leur montant est correct et peut séduire des ouvriers pressés de partir. Mais ils doivent mentir et PSA se défausse sur Pôle emploi et l’argent public. Un dispositif lié à la pénibilité serait plus légitime. Certains considèrent leurs situations en priorité, font le tour des syndicats et pressent de signer la fermeture d’Aulnay en échange de cette mesure. La direction va dans ce sens.

Comment percevez-vous l’alliance avec General Motors ?

L’alliance avec GM est vouée à être une chasse aux doublons : réduire les coûts, plutôt qu’une union complémentaire afin de développer de nouveaux véhicules. Seule une logique d’économies est à l’œuvre.
Des syndicats américains, allemands, polonais, coréens se sont rencontrés aux Etats-Unis : un réseau syndical intégré GM est constitué. CGT, CFDT, FO, CFE-CGC s’y sont rendus et participent à ce réseau. Un rendez-vous est prévu à Bruxelles.
Le dilemme prévisible à propos de cette alliance concerne le devenir de l’usine Opel de Bochum d’un côté, de celle de Rennes de l’autre qui produit des gros modèles – segment D – qui pourraient être produits sur une plateforme en Allemagne. La technologie de ces gros modèles pourraient échapper à PSA au profit de GM. Par ailleurs, PSA et GM vont mettre en place une centrale d’achat commune, ce qui pourraient redistribuer les cartes aux dépens de nos régions. Le rayonnement mondial souhaité par les directions est en question : quelle possibilité de traîter au mieux avec des fournisseurs à Detroit ?

Le gouvernement prend la mesure de la situation ?

Le plan Montebourg est problématique pour PSA. Ses principales mesures ne soutiennent que peu la firme : aide aux véhicules électriques, ceux de PSA sont tous fabriqués au Japon, ainsi la mesure soutient l’activité… au Japon ; aide aux véhicules hybrides : PSA vient d’arrêter les programmes hybrides rechargeables. De plus si il y a aide publique, il est nécessaire d’obtenir des engagements fermes de PSA de produire en France (là où sont les contribuables concernés ). Les syndicats, avec des approches et des usages différents, sont unis dans cette situation. La CGT favorise cette unité et admet le bienfondé de ce pluralisme. La CGT est pour le maintien de tous les sites. D’autres admettent presque déjà les fermetures et entendent lutter pour revitaliser les sites.

Dans quelles dispositions sont les salariés à Sochaux et Belchamp ?

Les salariés sont inquiets, l’unité est nécessaire. Le rapport SECAFI est vivement attendu par tous au CCE. Il n’y a pas d’effervescence combative mais des adhésions se font à notre syndicat que certains écoutent maintenant plus attentivement.
A Sochaux, 600 emplois ont été perdus, ceux du secteur « amortisseurs ». Ils seront certainement faits en Espagne avec des composants du sud-est asiatique. La CGT n’a pas obtenu une majorité au CCE pour bloquer cette décision par une enquête. Cependant un expert libre est intervenu. Il a préconisé un maintien de l’activité locale en haussant la production (pour équiper davantage de véhicules PSA avec des amortisseurs PSA) ou en demandant une installation du fournisseur dans le bassin ici. Les élus de Pays de Montbéliard Agglomération ont suivi la préconisation et réserver un terrain à cet effet. La direction PSA n’en a rien fait. C’est un savoir-faire qui est abandonné.

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