La Chronique de Filou – Le printemps des rivières comtoises

dessoubre_pollution

Le printemps … "on ne l'attendait plus c'lui là" (sur un air de François Béranger : "Tiens v'la le soleil, …).

Le printemps : ouverture de la pêche à la truite dans les rivières de première catégorie, c'est à dire dans les zones amont des rivières qui sont (normalement) peuplées de truites fario (Salmo trutta fario) et d'ombres communs (Thymallus thymallus) et d'autres espèces caractéristiques de ces eaux froides (normalement) et bien oxygénées (normalement) (vairons, chabots, …).

Le printemps, premières constatations depuis le bord de l'eau : les fonds des rivières sont très, très, très … sales, très très très … noirs. Sur le fond du Dessoubre, un pêcheur a écrit POLLUTION avec les graviers calcaires qui devraient normalement être blancs. Et un autre pêcheur signale les premiers poissons malades dans la Loue. Ces fonds noirs sont dus à des algues brunes, une marque de l'eutrophisation des rivières, nourries par le phosphore fixé sur les particules fines. Ils sont certainement en lien direct avec les épandages de lisiers (et fumiers) excessifs ou mal effectués. Ces épandages agricoles imbéciles, effectués en hiver ou beaucoup trop tôt au printemps, apportent azote et phosphore vers les cours d'eau. Parfois, dans les pires conditions (météo défavorable, non respect des règles et des plans d'épandages, épandages aux bords des rivières), la rivière peut directement être contaminée, par exemple par de l'azote ammoniacal toxique.

Le printemps, c'est aussi la période de frai des ombres communs. Ils commencent à se rassembler et ils vont gratter le fond pour préparer le lieu de ponte. C'est une période où les poissons ne mangent pas ou très peu, surtout les mâles, et c'est toujours une période difficile pour ces géniteurs fatigués. Aujourd'hui, nous sommes nombreux à penser que les fonds si sales, les obligent à gratter davantage le fond pour préparer la frayère. Et les micro-blessures qui en résultent seront plus nombreuses et salies cette pollution de particules et de micro-algues. Ces plaies, sur des poissons affaiblis, seront des sites parfaits pour le développement du parasite opportuniste Saprolegnia qui finira par tuer le poisson et infecter toute la rivière et les autres espèces.

Et c'est pourquoi, au printemps, nous allons voir et revoir, ces maudites tâches blanches sur les truites et les ombres. Evidement, les mortalités ne seront pas aussi spectaculaires qu'en 2009 ou 2010 pour la Loue ou 2014 pour le Dessoubre : normal y'a plus de poissons !!!

Déjà 6 ans depuis l'enterrement de la Loue à Ornans le 19 juin 2010. Et malgré le travail des passionnés du collectif SOS-Loue Rivières Comtoises et de l'association ANPER-TOS, nos dirigeants nationaux et locaux, une grande partie du monde agricole, sont toujours dans le discours, la dénégation et l'inaction.

Quel monde, quelles rivières, quels sols, quelle eau, allons-nous laisser à nos enfants ?

Soutenez les associations !

Chronique de Filou 03042016-2

Laisser un commentaire